samedi 21 novembre 2009

Voie des Maîtres et Disciples




Dans son livre Maître et disciple, Steiner affirme que :

« Masqué ou déclaré, fantasmé ou en acte, l’homo érotisme est intimement mêlé à la phénoménologie de la relation de maître à disciple : un fait élémentaire, banalisé par la fixation sur le harcèlement sexuel et les stéréotypes du politiquement correct »

Admettons que la citation de Steiner est une vérité. Dans ce cas,la relation entre enseignant enseigné est une relation de séduction cachée ou déclarée.
De là, il est presque acquis que le savoir passe par deux voies, soit par l’autorité, soit par le jeu de la séduction. Mais ce dernier à ses revers.

L’attirance existe dans l’acte pédagogique ainsi que l’homo érotisme à travers le fait même de la socialisation de la relation, par la verbalisation.
Dans la persuasion, l’éloquence, la pensée structurée, on arrive à convaincre l'apprenant en sollicitant son esprit et son âme. Ceci crée une captation.

Deuxième notion : ce que la société véhicule comme stéréotypes, le professeur doit rester un professeur, respecter les règles qui se résument en l’exercice d’un pouvoir patriarcal, religieux, observer une distance vis-à-vis de l’apprenant.

Est-ce que tous les professeurs peuvent devenir des Maîtres? Est-ce que tous les Maîtres le sont?
Peut-il exister un enseignement sans séduction?
Selon Steiner, non.
Séduction, persuasion, captation : réseau tripartite pour hypnotiser l'apprenant. Ainsi, le maître recourt à des ressources qui sont de l'ordre de la séduction et pas uniquement du savoir. Charmer ou captiver en usant de séduction fait du maître un manipulateur. Manipulation ici dans le sens positif du terme du moment elle sert à la transmission d'un savoir.
A ce niveau,une alchimie s'installe dans la relation maître disciple. L'enseignant, magicien qui fait vivre ce qu'il enseigne.
coup de foudre, captation, aura, espace, temps , maturité.

Est-ce que le temps intervient dans la relation maître disciple?

Le temps est conjugué à tous les niveau.L'appropriation de l'espace joue aussi un grand rôle dans la valorisation de cette relation. Jadis, l'enseignement se faisait d'une manière circulaire: le maître en est le début et l'aboutissement. Actuellement, la disposition se complique et la passation du savoir l'est aussi, relation de cause à effet:
-l'amphi, symboliquement est disposé comme un puits: l'étudiant doit descendre vers le savoir.
-les salles,plus le nombre des élèves augmente, plus la disposition se complique, plus l'énergie se perd.La perte du corps (contact visuel avec le maître) conduit automatiquement à la perte de l'aura du savoir.


Tous les enseignants peuvent-ils devenir des maîtres? Tous les maîtres le sont-ils?
Non.La notion du Charisme chez un enseignant c'est ce qui amène une influence en plus de la Vocation.
" Un maître charismatique,un professeur inspiré prend en main, dans une étreinte psychosomatique radicalement totalitaire, l'esprit vivant de ses étudiants ou disciples.Les dangers et les privilèges ne connaissent pas de borne" Steigner.

Qu'est-ce à dire?
Le risque que prend l'enseignant en s'investissant complètement dans l'acte d'enseigner peut être fatal. Un grand maître ne mesure pas les risques, il s'investit dans cette relation corps et âme: désir de perfection,se mettre en voie de "périr", donner la priorité aux étudiants...
Le risque que prend l'enseigné aggrave ou améliore cette aura du savoir . l'enseigné suce la sève du savoir, vide le professeur tout en se construisant, en bâtissant son avenir.

Plus le maître prend des risques en donnant, plus il s'implique, plus il demande en retour, il rentre dans un processus de pacte de savoir surtout de "l'élu" car tout maître a un élu. La peur de la trahison, de l'échec, de s'être trompé dans son choix... sont les bêtes noires qui hantent tout maître digne de ce nom. c'est pourquoi, le fait de s'exiler chez les bouddhiste est un acte de courage. Il traduit le refus du maître à reconnaître son échec ou la trahison de ses disciples.

Pour conclure, je reviendrais à cette phrase qui peut être choquante en apparence:
"l'enseignement se nourrit de la sexualité inexprimée..."
On est loin des ces maîtres de l'antiquité grecque, notre enseignement ne se nourrit ni de l'amour ni du sacrifice encore moins de la sexualité inexprimée ou déclarée. Un vide plat, un manque d'intérêt de part et d'autre, absence de motivation. Une ombre haineuse plane,une relation de guerre, de confrontation s'installe où se consume et l'enseignant et l'enseigné sur l'autel de la déchéance du savoir.
Accepter de s'investir dans cette relation c'est être fataliste.Refuser de s'y impliquer c'est faillir à une responsabilité et trahir son devoir.
Pour moi, Vivre cette relation reste le meilleur choix. User de séduction ou/et de pouvoir devient un devoir, périr dans une participation affective et prise active des choses pourvu que..
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4 commentaires:

  1. Maître ou pas, l'enseignant est appelé a être compétent.C'est à quoi renvoie le terme "Vocation". La société moderne valorise l'efficacité,l'application, le sérieux de l'action et surtout la compétence. C'est ce qui valorise l'individu dans n'importe quel domaine et non seulement l'enseignement.
    Pourvu que... cette jeunesse actuelle puisse tirer profit de Maîtres comme toi chère Maîtresse.

    Youssef

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  2. Youssef, je ne suis la "maîtresse" de personne (sourire). Soyons sérieux,Tout à fait d'accord, la compétence est essentiel dans le pacte du savoir ainsi que la performance. le maître se doit d'être compétent et le disciple d'être performant. Mais cher ami, mon propos porte surtout sur la relation entre maître et disciple: les différents canaux de la passation du savoir, comment un enseignant pourrait créer l'intérêt de l'apprenant, le motiver et surtout lui faire aimer ce qu'il fait? le pousser à devenir meilleur, à se cultiver...

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  3. Bien des disciples éconduits se sont retournés avec brio contre leur ex-maître, à commencer par Ibliss. Curieusement, le savoir "utile" ne mène pas au pouvoir car non désiré initialement.
    Le domaine que les théoriciens n'abordent que rarement concerne le savoir pur d'essence infuse, qui ne nécessite ni maître ni enseignement. Le "disciple" est élu et son savoir s'accompagne simultanément de devoirs.
    Autre acs amusant ; lorsque le maître accepte de devenir le disciple d'un maître reconnu comme décisif.
    Ton texte redessine les contours des systèmes de diffusion/circulation de la science, mécanismes non innocents car ségrégant entre savoir positif et occulte, l'un étant contingent à une norme officielle (mandarine), l'autre étant "dangereux" car non contrôlable.
    Ton texte caresse des concepts fondateurs de dimensions telles que sectes, Ordres et castes missionaires.

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  4. Yug, la lumière s'oppose aux ténèbres; les mandarin(es)ne peuvent êtres seules source de vitamine C. Je délire comme d'habitude :)

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